Communication de crise, l’éthique ne paye pas

Il vaut mieux mentir qu’assumer en communication de crise.

La communication de crise connaît un grand nombre de principes unanimement reconnus et partagés ; elle doit être réactive, transparente, empathique et l’organisation en crise doit assumer et reconnaître ses responsabilités.

Une récente étude menée par trois chercheurs des universités de Birmingham (UK) et de Lund (Suède) vient de faire retentir un formidable coup de tonnerre dans le ciel serein de la communication de crise. Une expérimentation menée sur les postures de communication en temps de crise apporte des résultats sans ambiguïté : les stratégies du déni se révèlent plus efficaces que les stratégies de la reconnaissance.

Les chercheurs ont testé deux types de situations autour de cas de fraude majeure commises par une entreprise. Dans la première, la responsabilité de l’organisation ne pouvait être prouvée et aucune preuve ne pouvait être apportée. Dans cette hypothèse, le déni de l’entreprise apparaît crédible aux yeux de l’opinion publique.

Dans le deuxième type de situation, les preuves de la culpabilité de l’entreprise étaient manifestes et étaient portées à la connaissance du public testé. Et pourtant, malgré les évidences, si l’entreprise choisissait la stratégie du déni, celle-ci apportait des résultats comparables à la stratégie de la reconnaissance.

En clair, nier toute responsabilité, mentir effrontément ne se révèle pas moins efficace qu’assumer ses responsabilités.

Comment peut-on expliquer un tel résultat ?

–       D’abord comme toute étude scientifique, les résultats doivent être mis en perspective avec la méthodologie de recherche. En l’occurrence, l’expérimentation a été effectuée sur un nombre réduit d’individus (284) et dans le cadre de cours qui donc ne concernaient que des étudiants. Par ailleurs, le type de crise simulée, en l’occurrence une fraude, de par son caractère peu visuel, suscite moins d’émotion qu’une catastrophe industrielle occasionnant des victimes et une pollution majeure.

–       Ensuite, et c’est ici plus interpellant, la création de doute , même en présence d’évidence, rend le message de dénégation crédible. Cela en dit long sur la défiance généralisée, le succès des fake news et l’état d’une société en perte de repères, pas forcément dupe ni réceptive aux théories du complot, mais où la notion même de preuve et donc de vérité s’estompent.

Un des derniers clous  dans le cercueil des illusions de l’éthique en communication vient d’être enfoncé.

 Référence :  Matteo Fuoli, Joast van de Weiger et Carita Paradis, “Denial outperform apology in repairing organizational trust despite strong evidence of guilt”, Public Relations Review, n° 43, 2017, p. 645 à 660.