Communication & Réchauffement climatique

   Il est toujours délicat lorsqu’on croit fortement à un sujet de se mettre en position critique car cela risque d’apparaître comme une manoeuvre de déconstruction.

Le problème se redouble en matière de réchauffement climatique. Si je crois comme 99% des scientifiques à la réalité non seulement du déréglement climatique, à la part anthropique, aux conséquences estimées graves et à la nécessité d’agir maintenant, je considère très mauvaise et en tout cas pas à la hauteur des enjeux la communication du GIEC.

Un événement important de ce point de vue aura lieu dans quelques jours. Lors de la 34eme session du Giec (IPCC) qui aura lieu du 14 au 19 novembre à Kampala, la stratégie de communication sera discutée.

Le fait que ce soit le 20ème et dernier document (N°20. Ref IPCC XXXIV/Doc 20. Review of the IPCC Process and procedures. Communication strategy) donne déjà une idée de l’importance très annexe que la direction du Giec entend donner à la communication.

Ce document est accessible depuis la page portail ici : http://www.ipcc.ch/

On se souvient que l’an dernier, suite à la controverse du Climate gate, l’Interacademic Council avait vivement recommandé au Giec de se doter d’une stratégie de communication. Des bribes avaient été formulées il y a queqlues mois (on les obtient sur la site du Giec , home page), ici le Giec franchit une nouvelle étape.

On peut y détecter un réel progrès tant les lourdeurs sont fortes, mais je reste trés inquiet par ce document qui selon moi ne porte le qualificatif de stratégique que de nom.

Point positif: Le Giec effectue un réél constat de la situation et des dangers liés à une absence quasi totale de communication qui a laissé le champs libre aux climato sceptiques. Et le danger était d’autant plus fort que la parole des alliés naturels du Giec sont les ONG, en conséquence les climato sceptiques purent s’engouffrer dans la brèche et dénoncer la collusion des travaux et le militantisme environnemental.

Le texte pointe l’absence de réactivité, l’absence d’ouverture aux attentes culturelles des diverses parties du globe, la faiblesse organisationnelle. Et rappelons que depuis le début de l’année il n’y a toujours pas de responsable de communication en poste, malgré l’appel à candidatures qui fut lancé.

Mes critiques sont d’ordre général et particulier:

En général, le texte met la charrue avant les boeufs, une réélle stratégie de communication s’interroge sur les objectifs de communication, les messages, la vision, l’ambition, la posture, les valeurs, ici rien de tout cela. Et on passe directement du constat à des propositions de mise en oeuvre de moyens. Certes, le premier document mis en ligne prenait déjà en compte certaines de ces questions, mais on a ici l’impression d’un document totalemnt déconnecté d’une vision stratégique au profit d’une démarche purement instrumentale.

De même, ce document est purement rédigé dans une perspective « défensive » comme si la communication du Giec ne devait être qu’une communication de crise permanente. Mais si le Giec souhaite sortir de sa com de crise, la première chose serait justement de créer son image forte, de renforcer sa réputation et ne pas être seulement dans le réactif.

Sinon, plus en détail:

–  je suis sceptique de devoir toujours répondre aux médias dans les 48h. Il y a lieu en relations presse de pouvoir distinguer les demandes et une demande de CNN devrait être traitée dans l’heure qui suit et tant pis si le media local n’a pas la réponse qu’il attendait. Un peu de réalisme est parfois nécessaire.

– Il n’y a rien sur les réseaux sociaux. C’est étonnant de constater dans quel monde vit l’état-major du Giec et clairement son président, en ne se référant qu’aux médias traditionnels. C’est sans compter sur l’existence des blogs, forums, et force des réseaux sociaux on line.

– Il n’y a rien sur les stratégies d’alliance, pourtant une des clés de réussite en communication de crise.

– Il est étonnant de voir que la structure de communication serait basée à Londres pour la partie Europe alors que toutes les institutions européennes sont à Bruxelles.

– Je trouve absurde la faible ambition en matière de structure de communication. Le document plaide pour une décentralisation. Certes, c’est politiquement plus acceptable, mais si l’on veut forger une image cohérence, forte, il est préférable de créer une structure d’impulsion et de coordination forte.

Bref, avec une ambition de communication aussi faible, les climato sceptiques ont encore de beaux jours devant eux.