Logique ce silence écologique dans la présidentielle ?

Depuis quelques semaines, l’argument de l’absence de toute parole écologiste dans la campagne électorale se fait lourdement entendre. Tacitement, c’est l’incapacité d’Europe Ecologie Les Verts et plus spécialement de sa candidate Eva Joly qui est pointée.

Il est bon de remettre quelques éléments en perspective.

L’explication principale réside dans le fait que le score prévisible d’Eva Joly (autour de 2 %) se situe nettement en-dessous d’une espérance de gain basée sur deux éléments : les intentions de vote autour de Nicolas Hulot lors de la précédente élection présidentielle et le score d’Europe Ecologie aux européennes de 2009 où ils atteignirent plus de 16 % des voix.

Dans les deux cas, une forte prudence s’impose. Dans le premier cas, Nicolas Hulot fut effectivement crédité de scores entre 7 à 15 %, mais en analysant leur évolution, le pic de 15 % fut atteint (Sondage BVA / Orange) le 5 décembre 2006, et le dernier sondage publié par cet institut en date du 17 janvier fournit une estimation à 9 %. Outre le fait que la tendance était baissière, on peut surtout estimer qu’entre une intention de vote envisagée en l’absence de plusieurs candidats déclarés bien avant l’ouverture officielle de la campagne et le vote effectif, il peut y avoir un sérieux décalage.

Quant à la relation avec le score aux européennes, qui témoignerait d’un reflux majeur, il n’y a tout simplement rien à voir. Depuis son entrée sur la scène politique en 1974, le mouvement écologiste a toujours été plutôt bon aux élections européennes (autour de 10 % en 1989 et en 1991) et historiquement toujours faible lors des élections présidentielles. Ce n’est qu’à une reprise que le candidat écologiste a dépassé les 4 %, c’était en 2004. A la dernière présidentielle, Dominique Voynet avait atteint 1,57 %. Le type de scrutin est déterminant pour le score écologiste qui est bon lorsque la proportionnelle est présente (européennes et régionales) et mauvais au scrutin majoritaire (présidentielle et législatives, sauf dans cette dernière hypothèse, en cas d’accord avec le parti socialiste).

En outre, la précédente campagne marquée par le pacte écologique de Nicolas Hulot avait bénéficié d’un formidable contexte entre la sortie du film « Une vérité qui dérange » d’Al Gore à l’automne 2006 et la publication du quatrième rapport du GIEC en février 2007. Fukushima date de plus d’un an et les contestations autour de Total, entre fuite de gaz en Mer du Nord et possible exemption de poursuites liées à l’Erika, peinent à se faire entendre.

Si l’on ajoute à cela l’approfondissement de la crise économique qui renforce les préoccupations court-termistes, le baromètre IFOP de mars 2012 indique que le thème de l’environnement est passé dans les préoccupations des français de 40 % en janvier 2010 à 27 % en février 2012 pour se retrouver en bas du classement.

Les raisons pour lesquelles l’écologie risque d’obtenir un faible score le 22 avril prochain semblent largement dépasser la seule capacité de la candidate à conduire sa campagne.

Thierry Libaert