L’écologie, c’était comment avant?

Caroline Ford, Naissance de l’écologie

 

Rédigé par une historienne américaine et paru en 2018, ce livre raconte la naissance de l’écologie et son évolution entre 1800 et 1930.

L’ouvrage (360 pages) est très détaillé et comprend une cinquantaine de pages de références.

Si le mot « écologie » et sa définition par Ernst Haeckel datent de 1866, l’ouvrage montre que la préoccupation environnementale était antérieure. Celle-ci a beaucoup évolué à travers les âges et l’auteur observe que si le terme d’environnement est vraiment apparu en 1922 dans le cadre de la géographie humaine, il ne s’est popularisé que dans les années 1970.

L’une des premières institutions à gérer l’environnement en France fut le Conseil de salubrité publique du département de la Seine, créé le 7 juillet 1802, et cela traduit les préoccupations originelles liées à l’hygiène et aux conséquences de l’urbanisation sur la santé.

En 1810 paraît le premier décret régulant le fonctionnement des établissements « dangereux, insalubres ou incommodants ».

 

Parmi les dates majeures, on peut citer :

  • 1845 : création de la Société Protectrice des Animaux
  • 1861 : une partie de la forêt de Fontainebleau est classée réserve artistique
  • 1901 : création de la Société pour la protection du paysage
  • 1909 : le premier congrès dédié à la protection des paysages
  • 1912 : création de la Ligue française pour la protection des oiseaux.
  • 1913 : premier parc national français, créé dans les Alpes
  • 1923 : le premier congrès international sur la protection de la nature

  J’ai appris le nom de François Antoine Rauch (1762 – 1837) qui peut être considéré comme le père de la pensée écologique française et de la recherche de l’harmonie de la nature. Il est d’ailleurs étonnant de constater qu’il écrivit en 1805 qu’elle était en déclin « par mille siècles de mutilations et d’outrages ».

Rauch était aussi un bon communicant cherchant à sensibiliser la population en organisant des festivals consacrés à célébrer les vallées, les lacs et les rivières ou à planter des arbres. Bien avant le rapport Brundtland, il prenait à témoin les générations futures : « Si nous laissons éteindre avec nous les règnes de la nature, nous verrons les générations qui doivent nous succéder verser sur nos tombes les larmes de la malédiction et du désespoir ».

 

Le premier combat environnemental a porté sur la déforestation, il fut porté notamment par le baron Rougier de la Bergerie, préfet de l’Yonne puis de la Nièvre qui fustigeait « la main dévastatrice de l’homme, dégradant partout le sol par les défrichements funestes et inconsidérés ». Moreau de Jonnès obtint lui en 1825 la médaille d’or de l’ Académie Royale pour un texte dans lequel il expliquait que la déforestation avait un effet majeur sur la qualité de l’air ainsi que sur les précipitations. Président du département des sciences physiques du Muséum d’histoire naturelle, Antoine Becquerel, qui devint membre de l’Académie des Sciences en 1853, publia son premier travail sur l’influence des forêts sur le climat. Il suggérait également que la déforestation favorisait les crues et donc les inondations. Les travaux sur l’incidence de la déforestation sur les inondations furent ensuite développés par l’américain George Perkins Marsh qui écrivit en 1864 le livre The earth as modified by human action, bien avant la conceptualisation de l’anthropocène donc.

 

  Au début du siècle, le sujet de la protection du paysage apparut plus fortement, moins lié des préoccupations purement esthétiques et l’un des fondateurs de la Société pour la protection des paysages nouvellement créée, Henri Cazalis, attire l’attention sur la dégradation des paysages naturels en raison des nouvelles pratiques commerciales, notamment « la mise en place de panneaux publicitaires » (1902).

J’ai également appris que le verdissement à Paris s’était réalisé pendant une courte période, essentiellement grâce à l’ingénieur Adolphe Alphand et à Jean-Pierre Barillet, jardinier en chef de la de la capitale. Ce sont eux qui créèrent les jardins du Trocadéro, le parc Montsouris, Monceau, le bois de Boulogne et le bois de Vincennes. En 1850, Paris comptait une vingtaine d’hectares naturels, en 1878, la ville en contenait deux mille.

Le livre se termine par une ouverture à la période d’émergence de l’écologie. L’auteur, Caroline Ford, situe le combat pour la protection du massif de la Vanoise en 1969 comme « un tournant majeur ». Il amena le Président de la République de l’époque, Georges Pompidou, à retirer l’agrément que son gouvernement avait donné à un promoteur immobilier et à se déclarer comme un défenseur de l’environnement, ce qu’il concrétise en 1971 par la création d’un ministère de l’environnement dans son gouvernement.

 

Au final, un livre dont je conseille la lecture pour mieux connaître l’évolution de la pensée environnementale, les liens historiques avec la santé, avec l’esthétique, la focalisation initiale sur la forêt et la compréhension immédiate des liens avec le climat et les inondations.