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la faute au greenwashing

Le vert vous donne-t-il le blues ?

Vous en avez assez qu’on vous culpabilise sur le sort de la planète ? Tout ce vert dans la pub vous donne le blues ? Le mot « durable » à toutes les sauces vous agace prodigieusement ? Vous êtes atteint de green fatigue. Pas de panique, vous n’êtes pas le seul.

Impossible de freiner la green fatigue. Un mal qui, selon l’expression inventée par les Américains, frappe les personnes rétives à un comportement écologiquement correct. En 2008, une enquête du Bureau central de statistiques des Pays-Bas (CBS) arrive à la conclusion que le comportement écologique des Néerlandais laisse à désirer. Le verre est moins souvent déposé dans les bulles à verre et, en dix ans, le tri des déchets de fruits et légumes a diminué. Selon les premiers résultats de l’enquête menée par l’Ifop (Institut français d’opinion publique) en 2010, de moins en moins de Français jugeraient important d’en savoir plus sur les questions écologiques. Et en Belgique ? Difficile à dire. Car les Belges restent, de loin, les champions d’Europe du recyclage des déchets d’emballage. Leur score ne cesse même de grimper. Alors que 76 % des déchets étaient triés en 2005, ils étaient 80,4 % en 2007 (dernière année de référence). Ce qui n’empêche certainement pas certains consommateurs de soupirer en face de leurs sacs jaunes, bleus ou blancs.

Les Belges restent tout de même convaincus de la nécessité d’agir en matière d’environnement. Selon la dernière enquête Fact (Feed the Advertising Community with Trends) de RMB Marketing, 60 % des personnes interrogées se disent persuadées que leurs habitudes de consommation causent des préjudices à l’environnement et qu’elles doivent prendre des mesures. Entre 60 à 70 % des sondés ont déjà commencé à changer leur mode de vie et à réduire leur consommation. Au menu, le recours aux ampoules économiques, le fait d’éteindre les lampes plus souvent, de cesser de laisser couler l’eau et de mettre les appareils hors tension. Dans la perspective essentielle de réaliser de substantielles économies d’abord. L’enquête démontre également que les Belges sont demandeurs d’informations concrètes pouvant les aider à adopter des comportements responsables. Il n’empêche, la green fatigue gagne tout de même du terrain.
La faute au greenwashing

La principale source de green fatigue a été nourrie par la communication des entreprises qui se sont précipitées sur cette vague écologique. Les grandes marques ont pris le tournant environnemental pour se forger un capital sympathie auprès des éco-consommateurs. Les campagnes publicitaires aux allures éco-bio sont devenues tellement nombreuses qu’elles ont donné naissance à un nouveau concept : le greenwashing. « Cette sur-utilisation de l’argument écologique dans la publicité consiste à survaloriser un élément et à le monter en épingle avec des terminologies écologiques, explique Thierry Libaert, professeur et responsable du Laboratoire d’analyse des systèmes de communication d’organisation (Lasco) de l’UCL et dont le livre Communication et environnement, le pacte impossible (PUF, 2010) vient de sortir. On met le mot « durable » à toutes les sauces, le tourisme durable, l’agriculture durable, etc. La couleur verte est partout. Des marques s’autoproclament labellisées. Un seul petit élément est monté en épingle. Par exemple, une grande entreprise pétrolière met en avant ses éoliennes, alors que celles-ci ne représentent que 0,1 % de son chiffre d’affaires. »

Trois secteurs, parmi les plus polluants, sont champions en greenwashing : l’automobile, l’énergie et les bâtiments et travaux publics. Vous avez dit bizarre ? « L’objectif est de travailler sur leur image d’entreprise pour lui donner une réputation écologique, développe Thierry Libaert. Les entreprises qui communiquent le plus sur leur image écologique sont celles qui ont le plus à se faire pardonner. Comme si la communication écologique était le fait des entreprises ayant les impacts environnementaux les plus lourds. »

Dans les faits, toutes les études montrent que cette technique marche de moins en moins. « Le public est de plus en plus sceptique, poursuit Thierry Libaert. Du coup, on demande de plus en plus aux autorités de contrôle, comme le Jury d’éthique publicitaire (Jep), de mettre en place une réglementation pour encadrer davantage la communication des entreprises lorsqu’elles parlent d’environnement. » Une étude menée depuis quatre ans en France montre une baisse de l’utilisation de l’argument écologique dans la publicité. « Cet argument a été multiplié par cinq durant les trois dernières années, poursuit le professeur. C’est considérable. Cette année, pour la première fois, on observe plutôt un tassement. Les entreprises ont compris qu’il fallait arrêter d’utiliser cet argument écologique un peu n’importe comment. »

Les conclusions du premier colloque international portant sur la communication verte, organisé par l’UCL et qui vient de s’achever à Bruxelles, va dans ce sens. « On fait une fixation sur le problème de la publicité utilisant l’argument écologique, résume Thierry Libaert. Mais on ne peut pas comprendre ce phénomène indépendamment de la méfiance envers l’entreprise et celle, plus globale, envers le monde de la publicité. Cette méfiance se focalise sur le greenwashing et la relation à l’environnement. » La préoccupation environnementale est devenue très forte. Chacun a la conviction qu’il faut agir de ce point de vue-là. « Mais voir des entreprises qui donnent le sentiment d’être responsables des problèmes d’environnement sans agir réellement agace grandement l’opinion. »

Quelles solutions pour les entreprises ? « Elles feraient bien de communiquer sur des réalisations plutôt que sur des engagements de moins en moins crédibles, répond Thierry Libaert. Les entreprises devraient réaliser des actions concrètes, nouer des partenariats. Une fois ceux-ci réalisés, alors seulement les entreprises peuvent communiquer dessus, mais sans se gargariser pour autant. Qu’une entreprise prenne à son compte des réalisations environnementales, alors que l’ensemble des entreprises en font autant agace l’opinion. Une communication plus neutre, plus objective, aurait plus d’impact. […] Il faut réintroduire le débat sur l’environnement au c£ur même de l’entreprise. » En résumé, moins de bla-bla, des actes.

Communication climatique, ça chauffe aussi.

Dans notre post précédent, nous alertions sur l’extrême frilosité du document relatif à la stratégie de communication du Giec qui devait être discuté à Kampala le 18 novembre.

A l’heure où un nouveau pseudo climate gate apparaît, où l’ambition de la confèrence de Durban paraît bien mince et où prospère le climato scepticisme qui s’infuse doucement dans l’opinion publique, le caractère majeur d’une réelle stratégie de communication pouvait être questionné.

OUF! Le coup n’est pas passé loin.

Car il y a eu une vraie discussion et les congressistes présents ont bien perçus que la communication devenait centrale. La perception qu’il fallait une vraie ambition en ce domaine a été partagée.

De fait, plusieurs pays et non des moindres comme la Nouvelle Zélande, les Etats-Unis, l’Autriche, le Japon, se sont fait entendre pour juger incompréhensible l’absence d’une réelle direction de la communication au Giec et le fait que depuis le début de l’année et l’appel à candidature, aucun responsable de communication n’ait toujours été désigné.

L’Australie a publiquement fait remarquer que le document proposé était trop faible et qu’une stratégie de communication digne de ce nom ne devait pas tomber dans l’instrumental mais s’interroger sur l’objet même de la communication, le message, les cibles, bref tout ce qu’on enseigne dans les écoles de communication.

La Belgique a demandé et obtenu la création d’une task force en communication, qui d’ailleurs existait avant la présidence de R Pachauri et que le fait qu’au moins un Vice Président soit associé à la stratégie de communication.

La Grande Bretagne a proposé que la stratégie de communication puisse faire l’objet de modifications et observations par les membres et cela avant la prochaine session, ce qui fut également accepté.

Enfin, le Giec comprend le rôle fondamental de la communication, il était temps.

Thierry Libaert.

Communication & Réchauffement climatique

   Il est toujours délicat lorsqu’on croit fortement à un sujet de se mettre en position critique car cela risque d’apparaître comme une manoeuvre de déconstruction.

Le problème se redouble en matière de réchauffement climatique. Si je crois comme 99% des scientifiques à la réalité non seulement du déréglement climatique, à la part anthropique, aux conséquences estimées graves et à la nécessité d’agir maintenant, je considère très mauvaise et en tout cas pas à la hauteur des enjeux la communication du GIEC.

Un événement important de ce point de vue aura lieu dans quelques jours. Lors de la 34eme session du Giec (IPCC) qui aura lieu du 14 au 19 novembre à Kampala, la stratégie de communication sera discutée.

Le fait que ce soit le 20ème et dernier document (N°20. Ref IPCC XXXIV/Doc 20. Review of the IPCC Process and procedures. Communication strategy) donne déjà une idée de l’importance très annexe que la direction du Giec entend donner à la communication.

Ce document est accessible depuis la page portail ici : http://www.ipcc.ch/

On se souvient que l’an dernier, suite à la controverse du Climate gate, l’Interacademic Council avait vivement recommandé au Giec de se doter d’une stratégie de communication. Des bribes avaient été formulées il y a queqlues mois (on les obtient sur la site du Giec , home page), ici le Giec franchit une nouvelle étape.

On peut y détecter un réel progrès tant les lourdeurs sont fortes, mais je reste trés inquiet par ce document qui selon moi ne porte le qualificatif de stratégique que de nom.

Point positif: Le Giec effectue un réél constat de la situation et des dangers liés à une absence quasi totale de communication qui a laissé le champs libre aux climato sceptiques. Et le danger était d’autant plus fort que la parole des alliés naturels du Giec sont les ONG, en conséquence les climato sceptiques purent s’engouffrer dans la brèche et dénoncer la collusion des travaux et le militantisme environnemental.

Le texte pointe l’absence de réactivité, l’absence d’ouverture aux attentes culturelles des diverses parties du globe, la faiblesse organisationnelle. Et rappelons que depuis le début de l’année il n’y a toujours pas de responsable de communication en poste, malgré l’appel à candidatures qui fut lancé.

Mes critiques sont d’ordre général et particulier:

En général, le texte met la charrue avant les boeufs, une réélle stratégie de communication s’interroge sur les objectifs de communication, les messages, la vision, l’ambition, la posture, les valeurs, ici rien de tout cela. Et on passe directement du constat à des propositions de mise en oeuvre de moyens. Certes, le premier document mis en ligne prenait déjà en compte certaines de ces questions, mais on a ici l’impression d’un document totalemnt déconnecté d’une vision stratégique au profit d’une démarche purement instrumentale.

De même, ce document est purement rédigé dans une perspective « défensive » comme si la communication du Giec ne devait être qu’une communication de crise permanente. Mais si le Giec souhaite sortir de sa com de crise, la première chose serait justement de créer son image forte, de renforcer sa réputation et ne pas être seulement dans le réactif.

Sinon, plus en détail:

–  je suis sceptique de devoir toujours répondre aux médias dans les 48h. Il y a lieu en relations presse de pouvoir distinguer les demandes et une demande de CNN devrait être traitée dans l’heure qui suit et tant pis si le media local n’a pas la réponse qu’il attendait. Un peu de réalisme est parfois nécessaire.

– Il n’y a rien sur les réseaux sociaux. C’est étonnant de constater dans quel monde vit l’état-major du Giec et clairement son président, en ne se référant qu’aux médias traditionnels. C’est sans compter sur l’existence des blogs, forums, et force des réseaux sociaux on line.

– Il n’y a rien sur les stratégies d’alliance, pourtant une des clés de réussite en communication de crise.

– Il est étonnant de voir que la structure de communication serait basée à Londres pour la partie Europe alors que toutes les institutions européennes sont à Bruxelles.

– Je trouve absurde la faible ambition en matière de structure de communication. Le document plaide pour une décentralisation. Certes, c’est politiquement plus acceptable, mais si l’on veut forger une image cohérence, forte, il est préférable de créer une structure d’impulsion et de coordination forte.

Bref, avec une ambition de communication aussi faible, les climato sceptiques ont encore de beaux jours devant eux.

Critique sur « le Pacte impossible »

Béatrice Jalenques, maître de conférences à l’INSA (Toulouse) et auteure d’une thèse remarquée sur le discours environnemental vient de publier une analyse détaillée de mon ouvrage « Communication & Environnement, le pacte impossible ». Son article est paru dans le N° 19 de « Questions de Communication » (Ques2com) 2011 pages 383 à 385. Autant dire qu’une analyse aussi détaillée, ca fait plaisir

je le reproduis ci dessous:

LIBAERT Thierry. Communication et environnement, le pacte impossible, PUF (Développement durable et innovation institutionnelle). Ouvrage publié avec le concours de l’université de Lausanne. 2010. 180 p.

Cet ouvrage part d’un constat pour le moins  troublant pour les observateurs de la  communication environnementale : au lieu d’accroître la crédibilité des organisations, la communication sur le développement durable engendrerait doute, scepticisme voire une franche suspicion de la part des différents publics visés, et bien plus que de simples accusations de greenwashing ou green speaking.  Cette assertion, nourrie de nombreuses analyses au fil du texte, montre toute l’évolution d‘un champ d’expertise en partie initiée par l’auteur, qui avait publié le premier livre sur le sujet, en 1992. La « Communication verte », alors envisagée avec enthousiasme, laisse ici place à une analyse beaucoup plus complexe, les dispositifs communicationnels étant scrutée sans illusions ni fards. Thierry Libaert présente ici une étude approfondie des rapports entre communication et notion de développement durable, s’appuyant notamment sur des études internationales. Très fouillées, les analyses se succèdent et confèrent une densité importante à cet ouvrage. L’auteur revendique ici une thèse particulièrement forte: « le développement durable est une invention de la communication » (p.14).

L’ouvrage débute sur les liens historiques entre l’apparition de la notion de développement durable et les dispositifs communicationnels mis en œuvre à son égard par les organisations ayant contribué à sa diffusion. Thierry Libaert définit alors « cinq modèles d’interaction » possibles explicitant les rapports entre communication et développement durable, autour de l’idée de « mise en relation ». Puis il détaille les principes de transparence et de participation liées à l’émergence historique de la notion de développement durable, démontrant que l’existence même de ces principes signifie que la communication représente une véritable composante du développement durable, et permet de poser cette notion dans un cadre démocratique reléguant plus loin les possibilités de propagande ou de radicalisation (non exclue cependant). L’auteur interroge alors les liens entre développement durable, publics et espace public, se penchant sur la théorie des stakeholders (R. Freeman et R. Philips 2002). Cela le conduit à interroger le lien entre notion de développement durable et notion d’intérêt général. L’auteur montre ensuite l’aspect « tactique » que revêt le développement durable pour les professionnels de la communication : mobiliser des publics autour d’un thème consensuel, « réenchantant » ainsi les rapports humains au sein et autour des entreprises. Cela produit en conséquence une forme d’instrumentalisation de la notion au bénéfice de l’entreprise, en particulier à travers la notion de RSE. Mais selon l’auteur, la RSE serait davantage qu’un outil au service des relations publiques des entreprises, la frontière entre objectifs et moyens s’effaçant au profit d’un positionnement central de la fonction communication.

Dans une seconde partie, Thierry Libaert choisit de montrer les difficultés à intégrer le développement durable au sein des dispositifs de communication. Il indique tout d’abord que l’aspect réputationnel supplante la dimension relationnelle dans la mise en œuvre de cette communication. L’existence du réseau Internet permettant aux différents publics de l’entreprise de comparer les différentes prises de parole de celle-ci sur un sujet donné, conduit les organisations à envisager de plus en plus un message unique valable pour tous, perdant par là en substance.

Puis l’auteur en vient ensuite à décrire ce type de communication comme un véritable échec. Tout d’abord, parce que le lien entre réputation de l’entreprise et engagement visible de celle-ci en terme de RSE ou de développement durable n’est pas démontré : plusieurs données d’enquêtes concourent pour dire que l’intérêt des publics envers les entreprises concernent en premier lieu leur cœur de métier. Ensuite, parce que les entreprises elles-mêmes n’ont pas mesuré de bénéfice réputationnel qui serait fonction de leur communication sur le développement durable. L’univers de la marque et les connotations qui lui sont associées jouerait autant voire plus que les pratiques de communication développement durable. Pour autant, les enquêtes montrent une attente forte d’engagement en terme de développement durable ou de RSE de la part des entreprises, en lien avec la sensibilité élevée des opinions envers les questions d’environnement. L’auteur souligne aussi le fait que les messages sur le développement durable, présents de façon très fréquente dans le discours des entreprises, ne se trouvent pourtant que très rarement associés à l’identité visuelle des entreprises. Ces messages sont également souvent contredits par d’autres éléments au sein des campagnes publicitaires mises en œuvre, autant de signifiés latents contradictoires. Les rapports développement durable sont aussi l’objet de contradiction : le développement durable y est présenté comme un facteur d’intégration puis il est aussitôt illustré par 3 types de performances présentées côte à côte (social, environnemental et économique). Enfin, les sites Internet spécialisés ne semblent que des vitrines froides permettant rarement les échanges interactifs, promis pourtant par l’ouverture même de ce type de dispositif par les entreprises.

Si les objectifs poursuivis par la communication sur le développement durable sont rarement atteints, Thierry Libaert montre que ces pratiques vont même jusqu’à produire des effets contraires. Tout d’abord, il apparaît que l’entreprise s’expose, au moment même où elle communique sur le développement durable. Un « effet boomerang » se produit, se posant essentiellement en termes de diminution de confiance (l’entreprise se poserait en fait comme coupable potentiel)  mais aussi d’augmentation des polémiques (en lien avec le fait que les médias traitent l’environnement comme un problème), dans un contexte global de méfiance, de soupçon, voire de critique ouverte envers les entreprises. En outre, bénéficier d’une bonne image en termes de développement durable ne semble pas protéger des crises ; parce que la réputation ne figure pas parmi les éléments liés à la naissance des crises. Enquête à l’appui, l’auteur estime ainsi que la communication sur le développement durable  produit un « effet déception », en situation de crise, ce qui tend à accroître l’intensité de la crise. Enfin, l’auteur s’intéresse au fait que la thématique environnementale produise de nombreuses oppositions face à son déploiement dans la publicité. Il relève les accusations de greenwashing, portant sur la dénonciation d’un décalage entre le dire et le faire, et ayant donné lieu à la disparition du BVP puis à la naissance de l’Autorité de Régulation Professionnelle de la Publicité (ARPP), en 2008, suite au Grenelle de l’environnement. Ces dénonciations conduisent à la mise en place d’un principe de proportionnalité, signifiant que la déclaration de l’entreprise doit refléter son action réelle. L’auteur souligne que cela entre en contradiction avec le principe d’exagération propre à la publicité, qui serait alors transformée en dispositif d’information. Au final, étant donné le contexte global d’un rejet de la publicité en général, cela explique pourquoi le débat ne peut se concentrer aujourd’hui que sur les critères de normalisation de l’usage de l’argument écologique dans la publicité.

Thierry Libaert aborde ensuite la question de l’afflux de la thématique environnementale au sein de la communication interne des entreprises. Cette montée en flèche importante est à rapprocher du besoin fort de mobiliser les salariés autour d’une notion consensuelle. Or, avec le développement d’Internet, les salariés sont à même d’identifier les décalages possibles entre communication interne et communication externe, ce qui n’est pas sans conséquence sur la perception de leurs propres objectifs professionnels. Ils peuvent ainsi se montrer surpris du ton militant présenté au sein de certaines parutions de leur entreprise. La perte de repère des salariés qui s’ensuit est aussi liée au fait que les entreprises idéalisent fortement l’esprit animant leur salariés, évoquant la solidarité, sans tenir compte de la solitude structurelle qui les mure entre eux.

En dernière partie, l’auteur propose de s’écarter de la question du « comment mieux communiquer sur le développement durable » pour se centrer sur le fait que l’intégration du thème développement durable pourrait conduire à repenser l’ensemble du processus communicationnel. Il propose ainsi sept éléments allant en ce sens  : 1) le principe responsabilité, prenant par exemple en compte l’impact du support publicitaire sur la cible visée ainsi que sur les cibles adjacentes, 2) une communication humble, que l’on peut qualifier d’un appel à la sobriété sur la forme, 3) une communication holistique, 4) une communication participative, 5) slow PR, renvoyant à une communication plus persistante dans la durée sur le contenu des messages délivrés, 6) la transparence communicationnelle, partant d’une réflexion incluant les parties prenantes et consistant à délimiter la frontière entre secret et transparence, 7) une communication de modération, que l’on peut qualifier d’un appel à la sobriété sur la quantité de dispositifs mis en place, incluant une évaluation dans le but de lutter contre le gaspillage.

Ces différents éléments se combinent jusqu’à transformer la perception de la place et du rôle de la communication, entraînant l’abandon d’une vision mécaniste classique, ou d’une vision technique, pour envisager une conception éco-systémique de la communication, reposant sur les travaux d’Edgar Morin. Cette théorie éco-systémique s’appuie d’une part sur la notion d’interaction, emprunté à la théorie des systèmes, et, d’autre part, sur la notion d’impact, emprunté à l’écologie. Elle puise également à d’autres sources, dont la théorie relative de l’organisation décrite par Lawrence et Lorsch. Les dispositifs de communication sont ici considérés comme disposant d’un amont et d’un aval, c’est-à-dire qu’ils produisent des impacts à la fois lors de leur émergence et de leur déroulement, mais aussi lors de leur diffusion à travers l’infinie multiplicité des interprétations possibles de leurs messages. En conclusion, la notion de développement durable participe au réenchantement de notre monde, car elle commence par redéfinir et amplifier la communication vue comme un dispositif éco systémique.

La thèse avancée par Thierry Libaert laisse place ainsi à l’esquisse d’une théorie ambitieuse, l’éco-systémisme, dans laquelle la notion de développement durable correspondrait à la fois à une invention produite par la communication, mais aussi à une réinvention de la communication au sens large.

 : Edgar Morin, « Pour une crisologie », Communications, 1976, volume 25, p. 149-163.

 : Paul Lawrence et Jay Lorsch, Adapter la structure de l’entreprise, Ed. d’organisation, 1989.

Redresser une réputation, le cas DSK

Choix des mots et communication de crise : le soulagement de DSK

On sait que la crise peut détruire une réputation, mais qu’elle peut aussi la renforcer. On sait aussi que Dominique Strauss Kahn bénéficie des conseils avisés des meilleurs communicants de crise, on sait aussi qu’il a déjà montré dans le passé sa capacité à rebondir notamment avec l’affaire de la MNEF ou la cassette vidéo sur les HLM de la ville de Paris.

À l’heure où certains le donnent mort politiquement, le simple examen des mots employés dans sa première déclaration montre que rien n’est improvisé et que les spins doctors ont encore de beaux jours devant eux.

Leçon n°1 : se poser en victime, après que le mot de « cauchemar » a été employé, les termes utilisés traduisent cette volonté de générer de l’empathie. « C’est la fin d’une épreuve terrible et injuste ».

Leçon n°2 : faites intervenir vos proches : cette épreuve que vous avez traversée n’est rien par rapport à la souffrance de votre famille et vous n’êtes pas soulagé pour vous, mais pour eux. « Je suis soulagé pour ma femme, mes enfants, mes amis ».

Leçon n°3 : faites jouer une chaîne de solidarité, ce sera aussi tacitement une manière de culpabiliser ceux qui vous auront accusé et remercier ceux qui vous ont soutenu en vous « envoyant des lettres, des emails ».

Leçon n°4 : restez humain, vous aimeriez rentrer chez vous rapidement, mais vous devez d’abord récupérer votre passeport et saluer des amis, vous avez donc encore « des petites choses à faire ».

Leçon n°5 : hiérarchisez vos objectifs, le fait de faire sa déclaration en français, et d’annoncer sa volonté de retour « dans mon pays » traduit ce souci d’empathie et de proximité. On conçoit que le terme de « revenir en France » aurait paru trop neutre.

Bref, du grand art, en peu de mots soigneusement pesés, tout est dit. On peut imaginer une stratégie en deux temps dans les prochains jours, d’abord une focalisation sur l’épreuve traversée et l’on pressent l’exclusivité à un grand magazine ou une chaîne de télévision pour recueillir les premières impressions. Puis, une stratégie axée sur l’expérience internationale et ce que l’ancien directeur du FMI peut apporter à la vie politique française. Non, DSK n’est pas mort politiquement.

Défendre le climat, un sport de combat

Un ouvrage assez extraordinaire et qui raconte trente ans de recherche scientifique sur le réchauffement du climat. Le livre est rédigé par un scientifique américain de premier plan, ce qui rend son témoignage, vu de l’intérieur, passionnant. L’auteur montre l’émergence progressive du thème et relate sa première convention « Study of Man’s impact on climate » à Stockholm en 1971. Il reconnaît ses premiers tâtonnements et erreurs, explique la différence entre météorologie et climatologie (essentiellement une différence d’outils), et montre que la recherche en climatologie a considérablement bénéficié des progrès de la modélisation informatique.

Les batailles avec l’administration Reagan puis Bush sont racontées et notamment les manœuvres les plus incroyables pour délégitimer les climatologues, cela au nom du principe de primauté de la libre entreprise. S. Schneider note au passage que les républicains n’ont pas toujours été adversaires des préoccupations écologiques et que le président Nixon fut très actif dans le domaine environnemental (en particulier avec la création de l’Agence pour la protection de l’Environnement).

Parmi les moments les plus intéressants de l’ouvrage figurent les discussions au sein du GIEC pour aboutir à la publication d’un rapport. Ainsi, la reconnaissance par le deuxième rapport du GIEC en juin 1996 d’une influence humaine « perceptible » sur le climat a donné lieu à d’infinies tractations notamment en raison du blocage des pays exportateurs de pétrole.

Le titre « un sport de combat » apparaît pleinement justifié à la lecture des interminables et houleuses discussions lors des conférences mondiales comme celle de Kyoto, les tentatives de déstabilisation émanant de l’Arabie Saoudite, des Etats-Unis, de la Chine et de la Russie.

Un chapitre est consacré au rôle des médias « Les coulisses de la distorsion » (p. 203) où l’auteur critique le fait qu’en matière scientifique, les journalistes fassent comme en matière politique, c’est-à-dire mettent un point d’honneur à exposer les points de vue des deux parties en présence. Selon lui, le contexte scientifique est tout à fait différent et ne justifie pas que l’on traite des faits scientifiques comme des opinions : « Un journaliste ne peut pas résumer en une seule phrase les conclusions d’une centaine de scientifiques, puis les placer sur le même plan que les objections d’une poignée de négationnistes, dont une infime minorité de chercheurs avisés » (p. 217).

L’ouvrage se termine par quelques réflexions pessimistes autour de la question « La démocratie survivra-t-elle à la complexité ? »

Ce livre est la traduction française de celui initialement publié aux Etats-Unis en 2009 sous le titre « Science as a contact sport ». L’auteur est décédé en juillet 2010 à 65 ans. Un site internet lui rend hommage : http:// stephenschneider.stanford.edu

Stephen H. Schneider, Défendre le climat, un sport de combat, Ed. National Geographic, 2011, 296 pages

Les marchands du doute

Naomi Oreskes & Erik M. Conway

Merchants of doubt, Blombury Press, 2010, 356 pages

Un livre important qui explique comment, alors que toutes les données scientifiques démontrent une vérité, certains réussissent à semer le doute pour freiner toute mesure régulatrice.

Quels sont ceux qui parviennent à bloquer tout mesure de protection et selon quelles méthodes, c’est ce que cherchent à découvrir les auteurs à la suite d’une enquête particulièrement documentée.

Le premier cas analysé est celui des effets du tabac sur la santé. La réalité du danger avait été mise en évidence dès 1957 aux Etats-Unis par le US Public Health Service qui avait conclu que « le principal facteur de l’augmentation du cancer du poumon » résidait dans la consommation du tabac. Peut-être sentant le risque, l’industrie du tabac passe un contrat avec une agence de relations publiques, crée « Tobacco Industry Research Committee » et lance une campagne sur le thème du doute scientifique et de l’absence de preuves. Et, alors que les médias commencent à relayer les risques sanitaires, l’industrie réussit à vendre la doctrine de l’équilibre des points de vue et de la nécessité « éthique » de publier en contrepoint des articles critiques, le point de vue de l’industrie du tabac. Les relais d’opinion sont mis à contribution et en 1957 une brochure « Smoking and Health » est adressée à 350.000 professionnels de la santé aux Etats-Unis. L’association change sa dénomination trop évocatrice d’un lobby et devient le « Council for Tobacco Research ».

Le plus étonnant est qu’alors que toutes les études (près de 2.000 entre 1957 et 1967) pointaient la responsabilité univoque du tabac, la réaction de l’industrie du tabac consista en davantage de dénégations et l’accent toujours amplifié sur le doute : « Il n’y a pas d’évidence scientifique que la cigarette engendre le cancer du poumon ». Et le pire est la totale mauvaise foi puisque, et les éléments des procès ultérieurs le montrèrent, l’industrie du tabac était parfaitement consciente des risques, et cela dès 1953.

Les auteurs présentent ensuite le cas des pluies acides dont le phénomène fut découvert en 1963 comme résultat de la pollution de l’air. Ici également, la machine à engendrer le doute se met en place et les arguments seront souvent semblables : absence de preuve scientifique, disproportion entre les conséquences supposées et le coût des mesures de protection, probabilité d’autres facteurs explicatifs et notamment des causes naturelles. Le doute est propagé par des think tanks conservateurs comme le Hudson Institute ou le George Marshall Institute. Le travail de sape se poursuit et encore en 2007, ce dernier Institut écrivait que les risques associés aux pluies acides étaient « largement hypothétiques » et ce désormais en l’absence de toute étude scientifique pouvant étayer les propos.

Le cas du trou d’ozone est analysé. On retrouve les mêmes techniques de relations publiques et la création d’organismes en couverture institutionnelle comme le « Aerosol Education Bureau » ou le « Council on Atmospheric Sciences ». L’argumentation était élaborée autour de trois axes : absence de preuve que les CFC allaient dans la stratosphère, absence de preuve qu’ils produisaient de la chlorine, absence de preuve que celle-ci détruisait la couche d’ozone.

Pour les auteurs, « si la régulation environnementale devait être basée sur la science, alors l’ozone serait une success story » (p. 251). C’est en effet un rare cas où l’industrie, et Dupont Corporation notamment, comprit son intérêt économique en prenant les devants alors même que les think tanks (Marshall Institute, Heritage Fooundation, American Enterprise Institute, Competitive Enterprise Institute, …) restaient sur une position défensive. La critique provenait également – et surtout – des proches de l’administration Reagan et notamment du département des transports. Les arguments furent que les substituts aux CFC pouvaient être « toxiques, inflammables et corrosifs » et furent largement développés dans des revues comme le Wall Street Journal ou Fortune.

Après la première salve sur le tabac, l’industrie du tabac connut une deuxième secousse dans les années 90 avec la mise en évidence des dangers du tabagisme (Second Hand smoke). Ici, un programme fut élaboré, le projet Whitecoat, pour « renverser les conceptions scientifiques et populaires que le tabagisme passif est dangereux ». Des scientifiques furent recrutés, les mêmes think tanks furent mis à contribution, des icones furent utilisées (S. Stallone) et un argumentaire basé sur les notions de liberté et de tolérance fut mis en œuvre. La stratégie est « paralysis by analysis » ; insister sur la nécessité d’avoir toujours plus de données avant de décider.

Le chapitre consacré au réchauffement climatique est le plus actuel. Il montre que là aussi le consensus est quasi total dans la communauté scientifique et que les rares doutes concernent les conséquences et leur degré de gravité (échelle d’élévation de température) et non la part anthropique.

Les auteurs observent le décalage entre le constat scientifique et la réaction des politiques qui évoluent dans une urgence : « Quand vous allez à Washington et que vous leur expliquez la gravité des problèmes en 2050, ils vous répondent : Revenez me voir en 2049 ! »

Sur ce sujet, les auteurs montrent le décalage entre une vision économique, le court termisme politique et la croyance sociale au progrès technique par rapport à un constat d’extrême gravité émanant de la communauté scientifique.

Le septième cas présenté (le sixième concerne le programme de défense militaire appelé « guerre des étoiles ») traite de l’attaque révisionniste sur l’œuvre de Rachel Carson.

Rachel Carson est considérée comme la pionnière de la lutte écologique grâce à son ouvrage écrit en 1962, Printemps silencieux. Ce livre qui dénonçait les ravages des pesticides contribua à l’interdiction du DDT en 1977 sous l’ère Nixon. Or, ici également, alors que l’unanimité scientifique est totale, on voit apparaître, comme sur le site du « Competitive Enterprise Institute » des attaques sur le caractère outrancier de l’œuvre de Carson et le fait que le DDT n’était pas si néfaste que cela. Pourquoi, après 30 ans, revenir sur cette controverse ? Simplement parce que l’ouvrage marqua une rupture et la première victoire sur les lobbys industriels. En conséquence, discréditer l’œuvre, c’est tenter de montrer que le virage pris fut basé sur des données erronées et que « le besoin d’une intervention gouvernementale sur le marché doit être rejeté ».

J’ai vraiment beaucoup apprécié cet ouvrage qui n’est pas un travail à charge contre certains organismes ; on sent la rigueur d’un historien parmi les deux co-auteurs. L’ouvrage est excessivement bien documenté avec 60 pages de notes à la fin. C’est aussi un livre qui fait réfléchir sur le travail de certaines agences de relations publiques qui acceptent consciemment de concevoir des campagnes outrancièrement mensongères et ce en toute connaissance des risques.

L’ensemble fonctionne assez bien et les auteurs rappellent qu’un tiers des américains croit toujours que Saddam Hussein était derrière les attentats du 11 septembre, qu’un quart pense qu’il n’y a aucune preuve que le tabac peut tuer et 40 % doutent de la réalité du réchauffement climatique.

La principale information que j’ai retirée de cette lecture réside dans la complexité et rigueur des campagnes propageant le doute.

Complexité parce que j’imaginais qu’elles étaient surtout l’œuvre des lobbys économiques. Or, si ces lobbys sont extrêmement puissants, ils ne suffisent pas à expliquer la réussite des campagnes. J’ai découvert qu’un petit noyau d’hommes (Jastrow, Seitz, Nieremberg, Singer) plutôt issus de la haute administration américaine et généralement de l’aile ultralibérale de la politique et de la guerre froide, détenait les maillons d’influence, les réseaux clés et l’accès au processus décisionnel. Et que les fondements ultimes de leur action n’étaient pas la défense d’une entreprise mais de l’idéologie de la libre entreprise. Après la guerre contre le communisme, ces personnes ont diagnostiqué que le premier ennemi du système libéral était l’environnementalisme (décrit comme une pastèque : vert à l’intérieur, rouge à l’extérieur) et que sous prétexte de protection de l’environnement, c’était tout une idéologie régulatrice qui pouvait se mettre en place et saper les fondements de la libre entreprise, base de la démocratie américaine.

J’ai aussi été étonné par la rigueur des dispositifs propageant le doute : utilisation de think tanks, recrutement de scientifiques, création de pseudo organes scientifiques, campagnes de communication dans la presse économique, attaques ad hominem contre les scientifiques adverses, argumentaires élaborés, mise en avant auprès des rédacteurs en chef du nécessaire équilibre médiatique des points de vue.

Pour terminer, j’ai bien apprécié l’analogie présentée en épilogue de l’ouvrage et que je reproduis ci-dessous.

« Imaginez un gigantesque banquet. Des centaines de millions de personnes viennent y manger. Ils mangent et boivent jusqu’à satiété, dégustant ce qu’il y a de meilleur et de plus abondant comme jadis dans les villas romaines ou dans les palaces médiévaux européens. Puis, un jour, un homme arrive habillé en serveur de restaurant. Il dit qu’il apporte la note. Les convives sont alors choqués. Certains arguent que ce n’est pas leur note. D’autres nient le fait que ce soit même là une note. D’autres encore nient le fait qu’ils aient mangé quoi que ce soit lors du repas. Un convive affirme que l’homme qui tend la note n’a pas de légitimité pour le faire et qu’il n’est vraisemblablement pas serveur du restaurant, mais qu’il essaye simplement d’attirer l’attention sur lui pour gagner de l’argent pour ses propres projets. Finalement, le groupe conclut qu’ils ignoreront simplement ce garçon de café et partiront. »

C’est là où nous en sommes au sujet du réchauffement climatique

Mémoires étudiants et communication environnementale

     Les intérêts de nos étudiants et la communication verte

A l’Université catholique de Louvain, nos étudiants en master communication, option Communication d’organisations semblent avoir un fort interet à la communication environnementale.

Parmi les sujets qui seront présentés en soutenance d’ici une quinzaine de jours, nous avons:

– la communication des ONG sur le bien être animal

– les festivals de musique « responsables »

– l’évolution des identités visuelles sous le prisme de la RSE

– le greenwashing dans la publicité automobile

– Dix ans de RSE dans la communication interne de l’entreprise Solvay.

– La communication environnementale des marques de produits ménagers.

– Le développement durable dans la communication du secteur bancaire

– les incidences médiatiques du climato scepticisme.

– la sensibilisation des exposants d’un salon sur leur responsabilité environnementale, étude de cas.

Petites lectures du 1er semestre 2011

Sur les thèmes Communication, crise et environnement.

OCDE, Greening household behaviour. The role of public policy, OECD Publishing, 192 pages.

Un livre remarquable de précisions sur l’opinion publique environnementale dans les pays de l’OCDE et la manière dont les politiques publiques peuvent agir pour encourager le changement de comportement dans un sens plus écologique. Une grande masse de données réparties par thème comme l’usage de l’eau, les économies d’énergie, le traitement des déchets, les encouragements aux transports publics, les aliments biologiques. Chaque chapitre se termine par une courte synthèse mettant en évidence les implications pour les politiques publiques.

Edwin Zaccai, 25 ans de développement durable, et après, PUF, 238 pages. 

Un ouvrage qui revisite 25 ans d’une notion complexe. J’y ai appris pas mal de choses comme le fait que la représentation en 3 pôles ne datait que de 1997, qu’un des apports de l’Europe avait été d’imposer les acquis de l’Union aux nouveaux entrants, qu’on retrouve des textes sur la croissance verte dès 1976, que la première charte industrielle sur l’environnement vient des entreprises chimiques canadiennes en 1985. L’auteur observe que le développement durable a été « carbonisé » par la survalorisation du problème climatique. Beaucoup de données intéressantes et de réflexions. On regrettera quelques erreurs factuelles.

Régis Debray, Du bon usage des catastrophes, Gallimard, 108 pages.

Un essai qui tente de revisiter nos grandes catastrophes au regard des religions et de plus de 2000 ans d’histoire. L’auteur explique que le besoin de faire sens est premier en période de crise et que le désir prophétique est toujours tacite. Un livre étrange où Régis Debray adresse quelques piques aux philosophes contemporains, explique la méthode pour devenir un grand intellectuel, et quel peut être le rôle de la médiologie. Pas son meilleur livre.

Nancy Fraser. Qu’est-ce que la justice sociale? Reconnaissance et redistribution. La Découverte / Poche. 180 pages.

Réédition de l’ouvrage antérieurement publié en 2005. Composé de 6 articles réunis, présentés et traduits par Estelle Ferrarese, l’ouvrage part de l’idée que «la justice implique à la fois la redistribution et la reconnaissance» et cherche à en analyser l’articulation. Partant de l’idée hégélienne de reconnaissance, Nancy Fraser indique que la justice n’est pas réductible aux inégalités économiques et examine les conceptions d’Axel Honneth et surtout celle de l’espace public d’Habermas. Selon elle, les luttes pour la reconnaissance deviennent centrales alors que les luttes égalitaristes deviennent marginales. Un livre exigeant et important.

Paul Jorion. La guerre civile numérique. Textuel. 110 pages.
Spécialiste des questions monétaires, Paul Jorion, auteur d’un blog célèbre – 100 000 visiteurs par mois – propose un petit livre d’entretiens sur la guerre civile numérique, autrement dit le recours au web et aux réseaux sociaux comme outil de déstabilisation. Il se concentre sur les révolutions arabes et Wikileaks et fait découvrir de nouveaux concepts comme l’astro turfing ou le honey pot.
Il indique aussi qu’aux USA les internautes passent plus de temps sur les réseaux sociaux que sur leur boîte mail. L’influence est moins dans les think tanks que sur le 2.0, selon l’auteur.
Un livre sans prétentions, synthétique, facile à lire.

Richard Thaler et Cass Sunstein. Nudge: La méthode douce pour inspirer la bonne décision. Vuibert. 278 pages.
Excellent ouvrage sur les pratiques visant des modifications de comportement. Ce livre m’a fait penser à celui de Joule et Beauvois (Guide de manipulation à usage des honnêtes gens) que j’avais dévoré en son temps. On peut traduire Nudge par coup de pouce, autrement dit le petit déclic, basé sur la psychologie des comportements, pour asséner une décision. Les exemples sur les progrès réalisés dans le comportement éco-responsable sont très intéressants. Je recommande.

Nicolas Bourriaud. Esthétique relationnelle. Les presses du Réel. 124 pages.
Définie comme une théorie consistant à juger les œuvres d’art en fonction des relations interhumaines qu’elles figurent, produisent ou suscitent, l’esthétique relationnelle place la communication au centre de ses analyses. Alors que l’espace social réduit et encadre les possibilités de relations interhumaines, l’art contemporain s’efforce d’investir et de problématiser cette sphère relationnelle. Participation du public, performances, happening, l’art devient échange et interaction et le spectateur devient partie prenante de l’œuvre. Une bonne lecture.

Aurore GORIUS et Michaël MOREAU. Les gourous de la com. Trente ans de manipulation politique et économique.La Découverte. 312 pages.
Un ouvrage bien documenté sur les grands noms qui font la communication. Si les informations sont nombreuses, l’ouvrage est surtout dénonciateur et s’attache principalement à la communication des dirigeants économiques et politiques et moins à celle des organisations. Les directions de communication des entreprises apparaissent étrangement oubliées. Trois personnages sont principalement ciblés dans le livre: A. MEAUX, M. CALZARONI et S. FOUKS. Quelques erreurs repérées.

Gilles Finchelstein. La dictature de l’urgence. Fayard. 228 pages.
Une dénonciation de l’accélération du temps, très documenté, qui analyse un grand nombre de champs où la vitesse fait ses ravages : la finance, le travail, les transports, l’hôpital et beaucoup d’autres. On a plus de mal à être convaincu par les propositions finales pour décélérer.

Damien Masset. Réussir ses projets événementiels. 3ème édition. Gereso. 121 pages.
Un excellent ouvrage, très pratique, comportant de très pertinentes fiches efficaces pour l’aide à l’élaboration et au pilotage d’un événement. Je regrette juste l’absence quasi-totale d’indication des réseaux sociaux dans la communication événementielle.

Verdir nos comportements

OCDE. Greening household behaviour. The role of public policy.OECD publishing. 192 pages.

Un livre remarquable de précisions sur l’opinion publique environnementale dans les pays de l’OCDE et la manière dont les politiques publiques peuvent agir pour encourager le changement de comportement dans un sens plus écologique. Une grande masse de données issue d’une vaste enquête sur 10 000 ménages de 10 pays (Australie, Canada, République Tchèque, France, Italie, Corée, Mexique, Pays bas, Norvège et Suède) réparties par thème comme l’usage de l’eau, les économies d’énergie, le traitement des déchets, les encouragements au transport public, les aliments biologiques.  Chaque chapitre  se termine par une courte synthèse mettant en évidence les implications pour les politiques publiques.

Le livre est disponible en téléchargement par chapitre à partir du lien suivant:

http://www.oecd-ilibrary.org/environment/greening-household-behaviour_9789264096875-en