Jean-Claude MICHEA - Notre ennemi le capital

Jean-Claude MICHEA. Notre ennemi, le capital. Climats.

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Jean-Claude MICHEA. Notre ennemi, le capital. Climats. 314 pages.
L’ouvrage est intéressant d’abord dans sa forme, car son fondement est la reproduction d’un entretien de 70 pages sur lequel l’auteur greffe des « scolies », c’est-à-dire des commentaires de ce texte, une quinzaine, et chacun d’entre eux renvoie à des notes explicatives parfois plus longues que les commentaires. Cela donne un ouvrage un peu hybride, un peu à la manière des poupées russes. Le livre est une critique de la quête du profit et du fait que 62 personnes soient aussi riches que la moitié la plus pauvre de l’humanité. Il explique l’explosion moderne de la communication par l’érosion continue du lien social, il s’interroge sur ce qui resterait de l’esprit frondeur en France sans l’existence des cafés de quartier, il critique la pensée de gauche d’avoir été trop anti étatique à l’exemple de Foucault, ce qui laissa le champ libre au libéralisme.

Luc BERAUD - Au travail avec Eustache

Luc BERAUD. Au travail avec Eustache. Actes Sud.

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Luc BERAUD. Au travail avec Eustache. Actes Sud. 266 pages.
L’auteur était premier assistant sur les films de Jean Eustache, l’auteur du film « La Maman et la putain » en 1973 avec Bernadette Lafont et Jean-Pierre Léaud. Ce film, un de ceux qui m’ont le plus marqué, est décrit ici dans son making of et ce témoignage est extraordinaire. Eustache se suicidera en novembre 1981, après d’autres films mais un seul chef d’œuvre. Porté sur l’alcool, il avait fait figurer au générique de son film « Mes petites amoureuses » comme conseiller technique : Mr. Jack Daniel.

Gilles BOYER. Rase Campagne. J.C. Lattès. 266 pages

Un bon plaisir de lecture avec ce livre du directeur de Juppé aux primaires 2016. Il n’y a aucune révélation et on n’apprend pas grand-chose sur la conduite d’une campagne. Le livre est toutefois passionnant car il montre que la gestion du temps et l’énormité des sollicitations sont le problème central, qu’à un mois de l’échéance, Juppé était à 40 %, 10 points devant Sarkozy, Bruno Le Maire et François Fillon qui étaient près de 30 points derrière.
J’ai bien aimé la citation de John Major : « Si vous voulez de la reconnaissance, ne faites pas de politique, achetez un chien. » (p. 61).

Laetitia VASSEUR et Samuel SAUVAGE. Du jetable au durable

En finir avec l’obsolescence programmée. Manifestô. 156 pages.
Moi qui pensais tout connaître sur l’obsolescence programmée, j’ai été agréablement surpris par cet ouvrage. S’il est parfaitement clair et complet sur les grands enjeux du problème, il est également extrêmement concret sur les solutions collectives ou individuelles et fournit un grand nombre de conseils très pratiques.
Aux frontières du sujet, j’ai appris que « le nombre d’américains se déclarant « très heureux » aurait atteint son point culminant en 1957. » (p. 67).

Arnaud BENEDETTI. La fin de la com

Cerf. 94 pages.
Une excellente réflexion sur la communication et ses dérives. L’auteur rappelle d’abord les origines des relations publiques au travers de quatre grandes figures (Albert Lasker, Ivy Lee, Edward Bernays et John Hill), puis propose sa vision du passage de la communication à la com’ qu’il situe au moment de l’arrivée de V. Giscard d’Estaing au pouvoir en 1974.
Selon l’auteur « Moins on agit, plus on communique » (p. 68).
Il se montre très critique envers le système des primaires en raison de « l’extrême tension temporelle, la scénarisation médiatique, la propension à marketer le discours à des fins de différenciation culturelle » (p. 84).
Ce livre est également superbement écrit.

Arnaud BENEDETTI et Priscille RIVIERE. La Communication

Economica. 152 pages.
Ce livre arrive parfaitement à conjuguer la vision théorique et critique et une approche très pratique de la communication dans les organisations. J’ai particulièrement apprécié la « brève histoire de la communication et de ses pères fondateurs » (chapitre 2) remarquablement synthétique et précise. Rarement traité dans les manuels, le dernier chapitre relatif à la communication scientifique est également une vraie réussite.
Un ouvrage à recommander à tous les étudiants en communication, mais aussi à tous ceux qui s’intéressent au rôle central de la communication dans nos sociétés.

Monique WAHLEN et Benoît HERY. La transition marketing

Tome 1, Editions Le Cabinet. 84 pages.
Une très bonne lecture qui s’adresse aux spécialistes du marketing, mais aussi de la communication. On n’apprendra rien de vraiment nouveau, mais ce n’était pas le propos des deux auteurs qui était plutôt de proposer avec une extrême clarté et de nombreux exemples des clés de compréhension sur ce qui bouge dans le marketing.
Trois thèmes forment les axes de ce petit livre : intensité, justesse et maniabilité.
Deux autres tomes sont prévus, je les attends avec impatience.

Natalie BENELLI et al. Que faire des restes ? Le réemploi dans les sociétés d’accumulation

Les Presses de Sciences Po. 112 pages.
Le livre présente six résultats de recherches autour du réemploi. J’y ai appris que c’est en 1975 que l’Etat français a commencé sérieusement à légiférer sur les déchets et leur traitement. Les auteurs s’accordent à dire que le sujet du réemploi est largement sous-traité au secteur associatif. Ils observent que « les activités de récupération sont majoritairement réalisées par des individus occupant des positions sociales dominées ou marginalisées » (p. 31), ou pour le dire autrement qu’il y a une homologie entre gens et objets «de peu ». Il y a une précarité des objets, des structures et des travailleurs autour de la question du réemploi.

Hervé KEMPF. Tout est prêt pour que tout empire

Seuil. 110 pages.
Ancien journaliste environnement au Monde, Hervé Kempf livre sa vision du monde et propose « 12 leçons pour éviter la catastrophe », sous-titre de l’ouvrage. Selon lui « Avec le développement durable, on avait trouvé l’outil idéologique pour ne rien changer au système économique, tout en prétendant intégrer la contrainte environnementale » (p. 20). Il indique que l’écologie est la condition essentielle car toutes les autres menaces sont réversibles : « Le défi d’aujourd’hui est donc l’écologie, à côté duquel les autres aspects du présent sont, du point de vue historique, des péripéties (p. 59). Malheureusement, après le constat assez apocalyptique, les pistes proposées (déverrouiller le système, mesurer ses chances, diviser l’oligarchie, faire passer un message d’amour, …) n’emportent guère la conviction.

Neal CASSADY. Dingue de la vie et de toi et de tout

Finitude. 250 pages.
Largement inconnu par rapport à la bande Ginsberg, Burroughs et Kerouac, Cassady aura pourtant été aux fondements du mouvement beat, même s’il n’a pas écrit de livre marquant. J’avais déjà adoré le précédent recueil de ses lettres, Un truc très beau qui contient tout, paru en 2014 chez le même éditeur.
Ce recueil contient les lettres qu’il adresse de 1951 à 1968. L’ensemble est un peu inégal mais c’est passionnant d’observer une œuvre collective se mettre en place, voir par exemple que le livre culte Sur la route de Kerouac avait été refusé par tous les éditeurs. Rappelons que dans ce livre, le personnage principal, Dean Moriarty, n’est autre que Neal Cassady.